La Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) a appelé les autorités ghanéennes à fournir des informations détaillées sur le massacre de migrants survenu en Gambie en 2005. Le 22 juillet de cette année-là, un bateau transportant 44 Ghanéens, neuf Nigérians, deux Togolais, ainsi que des ressortissants de Côte d’Ivoire et du Sénégal, qui venaient d’accoster en Gambie en route vers l’Europe, a été intercepté par les forces de sécurité gambiennes sous le régime de l’ancien dictateur Yahya Jammeh. Les passagers ont été arrêtés puis exécutés.
Depuis cet atroce événement, les familles des victimes déplorent le manque de transparence et la « désinvolture » du gouvernement ghanéen, malgré l’envoi d’une équipe d’enquêteurs sur place immédiatement après les faits.
Plusieurs enquêtes officielles ont été menées après le massacre, mais leurs conclusions sont restées secrètes, et les familles des victimes réclament aujourd’hui leur divulgation. À l’époque, les enquêtes ont été entravées par de nombreux obstacles.
Marion Volkman Brandau, ancienne chercheuse pour Human Rights Watch, témoigne : « Nous avons rencontré de nombreux responsables qui nous ont affirmé avoir reçu des instructions pour falsifier les documents et dissimuler la vérité. En conséquence, les enquêtes menées, qu’elles soient ghanéennes, onusiennes ou par la Cédéao, n’ont pas reçu des informations exactes, et il y a eu un véritable dévoiement du processus ».
Cependant, des éléments clés pour la justice ont émergé, notamment grâce aux auditions de la Commission vérité et réconciliation de Gambie en 2019. Cette Commission a entendu des membres de l’escadron de la mort de Jammeh, connus sous le nom de « Janglers », qui ont décrit les arrestations et les exécutions des migrants, impliquant directement Yahya Jammeh dans ces atrocités. « Les témoignages révèlent que les exécutions ont été ordonnées, connues et approuvées par Jammeh », explique une juriste du collectif Jammeh to Justice.
En conséquence, la Commission a recommandé que Yahya Jammeh et onze autres complices soient poursuivis pour ce massacre. La Gambie est actuellement en train de mettre en place une cour de justice hybride, composée de juges gambiens et étrangers, destinée à juger les crimes commis sous le régime de Yahya Jammeh.